Le bâtiment va créer 25.000 emplois en 2019

La situation est peu courante. Le bâtiment pensait aller mal, il s'aperçoit qu'il est en forme. Pour son point de rentrée ce mardi, la Fédération française du Bâtiment (FFB) a révisé en forte hausse sa prévision d'activité. Sur l'ensemble de l'année 2019, elle ne devrait pas baisser de 0,5 %, comme la FFB le prévoyait en décembre dernier, mais au contraire progresser de 1,3 %. Le secteur va en outre créer de l'ordre de 25.000 emplois (en création nette) plutôt que les 5.000 attendus. « Les carnets de commandes sont à un niveau élevé, ils représentent 6,5 mois d'activité », résume le président de la fédération, Jacques Chanut.

Ce n'est pas grâce au marché de la rénovation : car là, pas de surprise, en dépit des aides à la rénovation énergétique il continue à stagner (+0,3 % cette année). Les autres marchés grimpent, pas toujours pour les mêmes raisons. La FFB a ainsi lancé un pavé dans la mare en dénonçant des statistiques ministérielles mensuelles de mises en chantier fausses . Ceci expliquant le décalage entre ses précédentes estimations d'activité et la réalité pour la construction de bâtiments non-résidentiels (administratifs, agricoles, etc.).

Rebond
Sur le marché des logements neufs, les raisons sont conjoncturelles. Le PIB résiste, et la construction avec. Alors que la FFB s'attendait à un recul de 4,5 % de l'activité sur ce front, celle-ci se maintient finalement. Elle devrait même continuer à résister, grâce aux taux d'intérêt historiquement bas et à l'assouplissement par les banques de leurs exigences sur l'apport des ménages. « Ce ne sont pas les ventes des promoteurs qui baissent mais leurs mises en vente », a remarqué Jacques Chanut.

La rareté du foncier en milieu urbain et la réticence des maires à accorder des permis de construire en cette année pré-électorale explique la raréfaction des programmes, mais la demande est toujours forte. Les mises en chantier devraient au final atteindre 400.000 logements (contre 430.000 l'an dernier), estime la FFB, et « le marché de la maison individuelle en milieu diffus [en zone rurale et péri-urbaine, NDLR] a rebondi cet été », note son président.

Vers un durcissement des conditions d'emprunt
Le résidentiel neuf se portant mieux que prévu, malgré le dernier coup de rabot sur l'aide à l'accession à la propriété en zones détendues, le bâtiment aura du mal à s'opposer aux prochains tours de vis du projet de loi de finances pour 2020. Mais, objecte la FFB, la santé du secteur tient aux conditions très favorables des emprunts immobiliers. Or ces dernières pourraient se durcir dès l'an prochain. « L'Europe commence à travailler sur « Bâle 4 », qui obligerait les banques à immobiliser beaucoup plus de fonds propres pour leurs activités de prêts immobiliers, s'inquiète Jacques Chanut. Pour dix euros prêtés, ce ne serait plus 2 mais 4,50 euros de fonds propres à immobiliser ».

Aide publique massive pour la rénovation
Dans l'immédiat, cela ne fera pas fléchir Bercy. La FFB s'inquiète notamment du projet d'exclure des aides à la rénovation énergétique les deux déciles les plus aisés de la population. Ils représentent 60 % des travaux. Elle ironise en outre sur « une aide de 15 euros par fenêtre changée », tandis que la rénovation stagne depuis des années. Pour la faire décoller il faudrait une aide publique massive, plaide-t-on à la FFB, alors qu'il faut vingt ans pour amortir le coût d'une rénovation énergétique. Or « l'enveloppe du CITE - environ 800 millions d'euros - a été divisée par deux en trois ans », se désole Jacques Chanut.

Le projet de loi de finances n'est pas le seul point de vigilance. La FFB surveille aussi la création projetée d'une filière de recyclage des déchets du bâtiment, avec reprise gratuite des déchets pré-triés pour éviter les décharges sauvages. Les discussions se poursuivent sur les modalités. « Selon une étude de l'Ademe, les décharges sauvages ne contiennent que 25 % de déchets issus du bâtiment », rappelle le président de la FFB. Leur reprise gratuite constituera donc une avancée, mais ne mettra pas fin à elle seule aux dépôts en pleine nature.